Pouvoir d’achat : l’inflation n’explique pas tout

Le pouvoir d’achat diminue sous l’effet de l’inflation et d’un rapport de force défavorable au travail face au capital

Le pouvoir d’achat, qui correspond au volume de biens et de services qu’un revenu permet d’acheter, constitue la première préoccupation des Français[1]. Rien d’étonnant, puisqu’il chute depuis le début de l’année (-1,9 % au premier trimestre 2022[2]) avec des conséquences dramatiques pour celles et ceux qui avaient déjà du mal à finir les mois. Si l’inflation, estimée à 5,8 % sur un an par l’INSEE, est la première cause de ce recul, limiter l’analyse à ce seul facteur serait une erreur. Les choix politiques et économiques de ces dernières décennies, et leurs conséquences sur la répartition des richesses, jouent en effet un rôle important.

Ce niveau d’inflation n’est pas un problème pour les salariés si l’augmentation de leur rémunération est supérieure ou égale à celle des prix. Mais il n’en est rien. La DARES (Direction de l’Animation de la recherche, des études et des statistiques) estime que si les prix ont augmenté de 4,6 % sur un an, les salaires n'ont progressé que de 2,3 % sur la même période, d’où une diminution du salaire réel de 2,1 %[3]. Car pour les salariés, c’est toujours la même règle : la modération salariale. Modération en période de faible croissance, au nom de la « compétitivité », modération en période de forte inflation, afin de prévenir une hypothétique boucle prix-salaires[4]. Pour les actionnaires ou les très hauts revenus, en revanche, c’est « face je gagne, pile tu perds », avec des montants versés aux actionnaires qui ont augmenté de 88 % en 10 ans ou une rémunération des patrons du CAC 40 bondissant de 67 % en 2021. Actionnaires pour qui l’inflation constitue même une opportunité, à l’image de Total ou d’autres, dont les profits battent des records, signe que le risque d’une boucle prix-profits (les entreprises profitent du contexte général de hausse des prix pour augmenter les leurs indépendamment de leurs coûts de production afin d’accroître leurs marges) est bien supérieur à celui d’une boucle prix-salaires.

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