Le 17 avril 2008 : Dernier voyage d’Aimé Césaire…

« Mon nom : offensé, mon prénom: humilié; mon état : révolté; mon âge : l'âge de pierre. Ma race : la race humaine. Ma religion : la fraternité. » Ainsi se présente l'illustre Aimé Césaire à travers la pièce Et les chiens se taisaient parue en 1958. Trente ans plus tard, son œuvre théâtrale est couronnée par l'inscription de sa pièce La Tragédie du roi Christophe au répertoire de la Comédie-Française.

Lorsqu'il s'éteint à 94 ans le 17 avril 2008, il laisse flamboyer pour l'éternité les flammes de la colère transcendée par la poésie. « Ce mot « nègre » qu' on nous jetait, nous l'avions ramassé. Comme on l'a dit, c'est un mot-défi transformé en mot fondateur. Mais il faut bien concevoir la Négritude comme un humanisme. Au bout du particularisme, on aboutit à l’universel. Si le point de départ c'est l'homme noir, l'aboutissement c'est l'homme tout court ». Ce mot-concept qu'il a inventé  apparaît en 1939 pour affirmer la fierté d'être Noir.e, la revendication des racines africaines des antillais descendants d'esclaves libres désormais d'exprimer leur discours et leur art.

Né en Martinique en 1913, Aimé Césaire rencontre Léopold Sédar Senghor, originaire du Sénégal, au lycée Louis-le-Grand avant d'être reçu en 1935 à l’École normale supérieure. Ensemble ils profiteront du renouveau de la culture africaine au cœur du Paris de l'entre-deux-guerres, terre d'asile des écrivains noirs américains en exil. Le futur député, alors président de l'association des étudiants antillais crée des revues politiques. De retour au pays natal, il s'insurge contre le système inique et nocif du colonialisme. Portant haut « la voix des sans voix », il s'oppose à la loi du 23 février 2005, qui vise à enseigner les « aspects positifs » de la colonisation aux élèves, en refusant de rencontrer Nicolas Sarkozy. Outré par le discours de Dakar (« le drame de l'Afrique, c'est que l'homme africain n'est pas assez entré dans l'histoire ») du président honni, l'humaniste Césaire est inhumé sans discours officiel. Le peuple martiniquais insiste pour que les cendres du maire de Fort-de-France (de 1945 à 2001) demeurent dans son île. Il entre symboliquement au Panthéon en 2011 par une fresque installée au cœur de la nef.

Même en ces temps de confinement, le poète nous intime à la mobilisation des consciences :

« Et surtout mon corps aussi bien que mon âme,

gardez-vous de vous croiser les bras

en l’attitude stérile du spectateur,

car la vie n’est pas un spectacle,

car une mer de douleurs n’est pas un proscenium,

car un homme qui crie n’est pas un ours qui danse … »

 

Cahier d'un retour au pays natal

Aimé Césaire 1913-2008

 

 

Bérénice Hemmer

 

Crédit photo : Inscription d'Aimé Césaire, Panthéon, Paris, France par Rémih

 

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