Le 3ème tour, un avant-gout de 6ème République

« 3ème au 1er tour, 1er au 3ème tour ». « Elisez-moi Premier Ministre ». Des slogans ? Un bon coup de com ? Non, une nouvelle stratégie de conquête du pouvoir. Et une brèche ouverte au cœur de la 5ème République.

Depuis 2002, la conjonction de l’instauration du quinquennat et de l’inversion des calendriers électoraux entre les présidentielles et les législatives ont conduit à un affaiblissement progressif de l’Assemblée nationale. De fait, les présidents de la République élus de 2002 à 2017 y ont bénéficié ensuite d'une large majorité. Cette logique poussée à son paroxysme s’est déployée au cours du premier quinquennat Macron, avec les fameux « députés playmobils ».

Le législatif n’exerçait plus de contre-pouvoir. C’est ainsi que la décision s’est concentrée dans les mains de l’exécutif, lui-même personnalisé par Sarkozy puis Macron autour du Président de la République, effaçant y compris toute place pour le gouvernement. Ce fut le cas au cœur de la crise sanitaire, les décisions étant prises par le conseil de défense.

Macron comptait bien poursuivre sur cette pente autoritaire. Son plan étant d’ailleurs sur le point de fonctionner, par l’accession une nouvelle fois au second tour de l’extrême droite avec Marine Le Pen.

Ce qui se passe en ce moment est tout à fait différent. Mal élu, par à peine un tiers des inscrits dont près de la moitié ont mis un bulletin à son nom contre Marine Le Pen, il ne dispose pas de l’élan dont profitait les précédents présidents, y compris lui-même en 2017. Et la colère qui persiste dans le pays malgré son élection est un signal de plus de l’agonie de la cinquième République. L’élection du Président ne règle plus rien.

Alors, la proposition de Jean-Luc Mélenchon de se saisir des législatives pour déterminer le bloc dont sera issu le Premier Ministre s’est imposée dans le paysage comme une perspective crédible, reprise par les commentateurs et confirmée par les sondages d’intention de vote des derniers jours. Le nombre de recherches internet concernant les modalités de nomination du Premier Ministre a explosé depuis 10 jours.

L’élection législative reprend toute sa place dans le calendrier démocratique et c’est un avant-goût de 6ème République. Les citoyens s’emparent des institutions, bousculent les habitudes et s’invitent dans la mécanique pour gripper la machine présidentialiste.

Plus que jamais le lien entre les objectifs de transformation écologique, de rupture sociale et la nécessaire refondation des institutions éclate au grand jour. C’est donc primordial d’élargir la dynamique de l’Union Populaire sur la base du programme. Mais aussi de travailler aux modalités de fonctionnement du rassemblement, sur le modèle du Parlement de l’Union Populaire, qui a permis le creuset et l’entrée en campagne de forces différentes mais complémentaires.

Certes il faut remonter la pierre jusqu’en haut de la colline. Mais contrairement à Sisyphe, à chaque tentative, de nouveaux points d’appui et des milliers de personnes viennent prendre part à l’effort, pour enfin réussir à la stabiliser au sommet.

Claire Mazin

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