La tiers-mondisation de la France

Tour à tour les signes d'un décrochage de la France s'accumulent. Fortement ébranlés par la gestion du Covid par le gouvernement, de plus en plus de jeunes étudiants ont recours à des distributions de nourriture pour faire face aux besoins élémentaires. Et l'on apprend que l'université de Strasbourg n'a pas les moyens de se chauffer et devra fermer 15 jours en hiver. Comme dans les séries américaines des années 80, les couloirs d'hôpitaux sont désormais encombrés de brancards où les patients attendent des heures qu'on puisse s'occuper d'eux. Selon le Secours Populaire, plus d'un français sur quatre ne mange pas à sa faim. Voilà la situation d'un pays du G7.

Comme dans les pays dits du tiers-monde, les inégalités s'accroissent entre une petite élite qui multiplie les super-profits indécents et une masse de la population qui est en voie de paupérisation. Les plus pauvres se voient de surcroît stigmatisés : chasse aux sans-papiers, chômeurs sommés de se mettre au travail quelles qu'en soient les conditions. La prolétarisation des classes moyennes est en marche, et elle est mise sur le dos de la crise climatique et de la guerre pour mieux en cacher les vrais bénéficiaires. Ni les jets privés ni les voitures haut de gamme ne sont concernés par les mesures qui touchent le plus grand nombre. C'est injuste. Mais cela atteste du régime de ségrégation qui se met lentement en place : seuls les plus riches auront encore accès à la santé, aux voies de communication. L'abondance n'existe que pour eux. Ils l'accaparent. On apprend par Le Monde « que le secteur privé sous contrat compte 40% d’élèves très favorisés, contre 20% dans le secteur public ». Pendant ce temps là le capital continue ses accumulations effarantes : le 22 septembre est désormais le jour du dépassement du capitalisme, jour à partir duquel les salariés ne travaillent plus que pour les profiteurs. Il a gagné 45 jours en dix ans : la confiscation de la plus-value s'accélère. Le travail ne paie plus ceux qui l'effectuent.

Les coupables, nous les connaissons. Comme pour les pays du tiers-monde hier, ce sont les décennies de politiques libérales qui, partout, ont remplacé les acteurs de terrain par des gestionnaires « cost-killers », sabrant dans les finances, supprimant des postes, des moyens. Aujourd'hui, sans honte, le président Macron relance son plan de modification du régime de retraites, arguant d'une nécessité de faire des économies pour payer l'éducation, les hôpitaux. Double peine : on demande à ceux qui ont subi la mise à mal des hôpitaux et de l'école d'en payer aujourd'hui la réparation – si tant est, bien évidemment, que les coupes claires dans les retraites iraient bien à ces autres services publics. Si nous ne voulons pas être aspirés par la spirale des dérégulations et de la disparition des services publics il faut œuvrer à la détermination d'un front commun : c'est un programme d'ensemble de rupture face au libéralisme, améliorant le niveau de vie par les revenus et la transition écologique.

Benoît Schneckenburger

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