Rejet du RIC Quand le nouveau monde ressemble à l’ancien

Entretien avec Bastien Lachaud, député FI de Seine-Saint-Denis

Les députés de La République en marche ont rejeté jeudi 21 février la proposition de loi de la France insoumise créant un référendum d'initiative citoyenne. Quelles leçons tirez-vous du débat?

Nous en tirons une immense colère devant le sectarisme et l’autoritarisme de la majorité. Ils n’ont même pas voulu débattre du texte, ou l’amender pour l’améliorer dans un sens qu’ils estimeraient plus opportun. Tout le monde s’accorde à dire qu’il faut revoir les mécanismes démocratiques pour que le peuple puisse intervenir dans les affaires publiques. Mais il est urgent d’attendre le Grand Débat. Les marcheurs essayent d’enterrer les aspirations démocratiques du peuple sous de vaines promesses. Ils prétendent en même temps que le référendum est césariste et bonapartiste, et qu’il faut conclure leur débat par un référendum. Incohérence ou aveu de leurs véritables intentions ? Je retiens que le nouveau monde ressemble furieusement à l’ancien.

Le gouvernement vous a accusé de récupérer le mouvement des gilets jaunes pour mettre fin à la 5e République. Que répondez-vous ?

Que c’est absurde : par définition les représentant·e·s du peuple doivent représenter les opinions politiques du peuple. Ce n’est que notre rôle de député·e·s. Par ailleurs, ce sont des propositions que nous portons depuis longtemps, dans le programme de 2012, dans le mouvement pour la 6e République, dans le programme présidentiel et législatif, sur lequel nous avons été élu·e·s, de 2017, et enfin dans nos amendements de juillet 2018 à la révision constitutionnelle… que la majorité avait déjà rejetés.

Le PS, LR et le Modem ont aussi critiqué votre proposition. Comment expliquer ce front commun de "l'ancien monde" et de LaRem ?

Les groupes d’opposition ont déploré, comme nous, le sectarisme de la majorité. Certains ont déposé des amendements pour enrichir le texte, preuve tout de même de leur intérêt pour le texte et le sujet. Mais on voit une grande frilosité, voire un franc rejet, pour le référendum révocatoire qui a eu le droit à de nombreux amendements de suppression. Les élu·e·s ont souvent du mal à accepter qu’ils n’ont qu’un mandat, pas une carte blanche, et qu’ils doivent rester sous le contrôle démocratique du peuple.

Les autres propositions de loi insoumises, notamment celle proposant l'interdiction du glyphosate, ont aussi été rejetées. A quoi sert tout ce travail parlementaire ?

Il sert à mettre à l’ordre du jour des débats qui traversent la société. Il sert à ce que l’opinion politique représentée par la France insoumise, et qui a rassemblé 7 millions de voix à la présidentielle, ait une expression institutionnelle. Peut-être que nos propositions de loi sont rejetées, mais en tout cas on peut en parler, montrer que c’est un sujet, argumenter, pour convaincre, et espérer l’emporter la prochaine fois.

Propos recueillis par Matthias Tavel

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