Municipales : Après le coronakrach, le coronabstention

Le premier tour des élections municipales, organisé dimanche 15 mars, a été marqué par un taux d’abstention record pour ce type de scrutin. C’est une réalité bien connue depuis des décennies, la montée de l’abstention est devenue un phénomène marquant de la vie démocratique française. Cette fois, la crise de participation trouve sa source dans un marqueur inattendu au nom désormais connu de tous : le coronavirus. Pour cause, le pays traverse la plus importante crise sanitaire depuis la grippe espagnole en 1918-1919. L’exercice d’analyse des résultats électoraux, sur toile de fond de circonstances exceptionnelles, s’en trouve dès lors rendu délicat.

Dimanche 15 mars, près de 54,5% des électeurs se sont abstenus au 1er tour contre 36% en 2014, soit le taux le plus important pour des élections municipales sous la Vème République. C’est un tournant inédit, marquant pleinement l’impact du coronavirus sur le bon déroulement du scrutin municipale censé mobiliser au plus proche du terrain. Traditionnellement, l’abstention est affaire de défiance. Ici, en dépit des circonstances extraordinaires, la problématique s’en rapproche. Face aux flots de signaux contradictoires du gouvernement, une partie de la population a privilégié une forme de prudence. L’annonce du maintien de l’élection par Macron suivie de près par les annonces d’Edouard Philippe la veille du scrutin a abouti de fait à un signal confus et inaudible. Comment penser sincèrement que la fermeture de tous les « lieux recevant du public non indispensable à la vie du pays » annoncé par Edouard Philippe moins de vingt-quatre heures avant le scrutin ne conduise à de lourdes interrogations pour les électeurs ? Beaucoup d’entre eux ont tiré leçon de cette dernière allocution.

Les votes « sans danger » dictés par Castaner n’auront quant à eux pas suffi à rassurer. Les chiffres de l’abstention dans les foyers principaux de l’épidémie en attestent. Dans certaines communes du Haut Rhin et du Bas Rhin, moins de deux électeurs sur dix ont voté. Le record est battu à Illzach, où 83,81% des électeurs n'ont pas voté, à Wittelsheim (82,18 %). Si les statistiques définitives ne sont pas encore disponibles, il est fort probable que les personnes âgées soient parmi les catégories s’étant le plus abstenues. C’est là une autre des contradictions entre l’allocution présidentielle invitant les plus âgés à rester chez eux en parallèle du maintien du scrutin municipal.

L’abstention liée au coronavirus aura eu pour conséquence de modifier substantiellement le résultat des élections municipales dont le 2nd tour demeurait lundi après-midi entouré d’incertitudes. Les équipes élues, elles, dès le 1er tour le sont sur une base démocratique étroite (parfois moins de 25% des inscrits) ce qui ajoute à la particularité de ce scrutin sous tensions.

Sylvain Noël

 

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