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UE Macron, extrême-droite unis contre les droits

Partout en Europe, les amis de Macron et ceux de Le Pen ont trouvé leur axe de propagande à l'approche des élections européennes : d'un côté, les progressistes, de l'autre, les nationalistes. Dans l’équipe « progressiste », on compte Emmanuel Macron, Jean-Claude Juncker (président de la Commission européenne et ancien premier ministre luxembourgeois) ou Guy Verhofstadt (président du groupe libéral ADLE au Parlement européen). Dans l’équipe nationaliste, on retrouve Marine Le Pen, Marcel de Graaff (président du groupe d'extrême droite ENL au Parlement européen), Matteo Salvini (le premier ministre italien), Viktor Orban (l’autocrate hongrois). Pourtant, ce clivage entre progressistes et nationalistes est tout à fait factice. En effet, il ne tient qu'à condition de laisser de côté toutes les politiques économiques ! Si on observe leur bilan ou leurs propositions en la matière, alors le clivage s’estompe. Tous ces individus font équipe, dans le camp libéral. Face à eux, les forces populaires et humanistes. Haine de l'État, cadeaux budgétaires aux plus hauts revenus sans contrepartie, laxisme avec les évadés fiscaux : voilà le programme commun de l'extrême-droite et des libéraux. Dans ces conditions, on comprend mieux leur tentative de verrouiller le débat européen !

Moins d’État

Que l'on soit d’extrême-droite ou libéral, les coupes budgétaires sont à la mode. Le gouvernement italien cible la politique migratoire et l’éducation. Macron cible les politiques de logement (baisse des APL) et d’emploi (suppression de contrats aidés). Tous réduisent l'investissement public au péril des routes, des ponts et des écoles. Tous affaiblissent l'État... et obéissent aux injonctions de Bruxelles le petit doigt sur la couture du pantalon ! Rien de nouveau : déjà dans les années 1980, Guy Verhofstadt (alors surnommé « baby Thatcher ») vendait pour une bouchée de pain les actifs publics belges (téléphonie...), utilisant l'argent pour augmenter le salaire des cadres dirigeants d'entreprise !

En outre, si Macron veut supprimer 120 000 postes dans la fonction publique d’ici 2022, le gouvernement italien a gelé toute titularisation jusqu’en novembre 2019. Finalement, les privatisations unissent aussi macronistes et extrême-droite : un grand programme de privatisations a été lancé en Italie (liquidation de l'immobilier public) comme en France (Aéroports de Paris, Française des jeux...). Et, finalement, lorsque la Commission européenne intime de privatiser le rail ou les barrages hydroélectriques, tout ce beau monde est ravi.

Moins de droits sociaux

Tout ce que l'Europe compte de gouvernements d'extrême-droite ou libéraux sont en accord sur le partage des richesses. En outre, l'axe libéraux-extrême droite a adopté ces dernières années une série de législations en faveur des sociétés multinationales. Elles consistent à baisser la fiscalité des entreprises les plus dominantes, en reportant les frais sur les PME. La Hongrie d’Orban n’applique plus qu’un taux de 9% d’imposition sur les sociétés. Il s’agit du plus bas d’Europe. Même au niveau international, pour trouver une fiscalité plus généreuse, il faut se tourner vers les Bermudes ou les îles Caïmans.

Mais pour complaire aux multinationales, les gouvernements macronistes ou lepénistes démantèlent surtout les protections collectives des salariées. La destruction du code du travail a été menée en Italie par Renzi, modèle de Macron. Le nouveau gouvernement italien l’a avalisé : il n’a pas rétabli l’article du code du travail permettant de réintégrer les licenciés abusifs, ni modifié le nouveau CDI-jetable créé par Renzi. Exactement la même ligne que celle de Macron avec ses « ordonnances Travail » ! On retrouve cette attaque obsessionnelle contre le monde du travail en Autriche. Le chancelier Kurz, surnommé le « Macron autrichien » et qui gouverne avec le FPO, proche allié de Marine Le Pen, y a porté à 12 heures quotidiennes la durée maximale d’une journée de travail, pendant cinq jours d’affilée.

Évadés fiscaux protégés, chômeurs pourchassés

Quant aux évadés fiscaux, ils se savent sous protection de l’extrême-droite et des libéraux. Parfois, ils y appartiennent directement : Jean-Marie Le Pen ou Frédéric Chatillon, conseiller de Marine Le Pen, sont suspectés depuis les Panama Papers d’avoir monté des sociétés offshores pour dissimuler des fonds hors de France. Pour les protéger, leurs alliés redoublent d’imagination. Le gouvernement italien a ainsi instauré une amnistie fiscale pour les personnes n'ayant pas payé des impôts déclarés ou sous-déclarés entre 2000 et 2017. Cela ressemble furieusement au « droit à l’erreur » de Macron, censé épargner les personnes ayant manqué à leurs obligations fiscales de façon fortuite… mais qui rend surtout la fraude plus aisée. Pour être bien certain de dégager les hauts revenus de leurs obligations fiscales, les gouvernements français successifs ont supprimé 3100 contrôleurs des impôts depuis 2010. Et Macron a rajouté une cerise sur le gâteau des millionnaires, abrogeant « l’exit tax » qui taxait les plus-values en cas de passage du domicile fiscal à l’étranger.

Ce type de cadeaux est réservé aux hauts patrimoines. En revanche, les milieux populaires paient cher la prise de pouvoir des macronistes ou des lepénistes, partout sur le continent. Les chômeurs ont été victimes en France d’un durcissement de leurs droits, avec l’obligation de reprendre désormais un emploi moins bien payé que le précédent. Sinon, leurs allocations sont coupées pendant un mois. La peine est identique s’ils ne parviennent pas à prouver qu’ils ont intensivement recherché un emploi (chose ardue dans plusieurs secteurs, là où les offres se discutent à l’oral, ou lorsque les réseaux de sociabilité sont déterminants pour être embauché). Là où les amis de Marine Le Pen gouvernent… la situation est rigoureusement identique. Le gouvernement italien de Salvini procède à la même réforme. Leur introduction d’un soi-disant « revenu de citoyenneté » à destination des plus pauvres (780€ par mois) s’est accompagnée de l’obligation d’accepter une « offre raisonnable » d’emploi. Mais une offre est jugée raisonnable, où qu’elle soit située dans le pays ! Sous Macron comme sous Salvini, le contrôle bureaucratique des plus pauvres et des chômeurs empire chaque année. En parallèle, ceux qui ne peuvent plus travailler voient leurs pensions réduites. En Italie, les pensions de retraite ne sont presque plus revalorisées lorsqu’elles dépassent 1500€ par mois. En France, Macron est encore plus extrémiste avec sa désindexation des pensions de retraite, qui ne suivent plus la hausse des prix.

Ainsi, aux élections de mai 2019, un bloc uni libéraux-extrême droite se présente à vos suffrages. Les premiers comptent transférer toute la législation au niveau de la Commission européenne tandis que les seconds ne veulent passer que par des officines nationales. Mais le contenu des textes qu'ils préparent, lui, demeurera interchangeable.

Hadrien Toucel

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