Paix : du Nobel à la réalité

Une fois par an, la paix fait l’ouverture des journaux télévisés lors de l’annonce du prix Nobel. Cette année aura mis à l’honneur la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (ICAN). C’est que l’actualité est lourde en la matière. Mais au moins ce choix est-il l’occasion de rappeler la paix est toujours une construction politique, donc géopolitique.
L’ICAN a mis à l’ordre du jour un traité international d’interdiction des armes nucléaires comme il en existe pour interdire les armes chimiques. Il a été signé par 122 pays en juillet dernier, dans le cadre de l’ONU. Sauf qu’aucune des neuf puissances nucléaires, dont la France, les États-Unis, Israël ou la Russie, ne l’a signé. L’essentiel reste donc à faire pour passer de l’utopie pacifiste à la diplomatie pacificatrice. Une voie étroite existe puisqu’en janvier dernier, le président chinois Xi Jinping en personne déclarait que « les armes nucléaires devraient être totalement interdites et détruites afin de construire un monde sans armes nucléaires ».
Mais pour avancer, encore faut-il que la France parle d’une voix claire. On ne saurait abandonner la crise nord-coréenne au duo infernal formé Kim Jong-Un et Donald Trump. La lutte contre la dissémination et pour le désarmement multilatéral passe par la diplomatie et des garanties collectives, les plus armés devant commencer par désarmer les premiers. La France pourrait proposer une conférence internationale sur le sujet. Mieux, elle pourrait montrer l’exemple en renonçant à participer au bouclier anti-missile de l’OTAN en Europe qui annihile l’idée de dissuasion.
Au lieu de quoi, F. Hollande puis E. Macron engagent la France dans une « Europe de la Défense » soumise à l’OTAN que les Français ont déjà rejetée en 1954. Ils avaient compris que c’est en fait une Europe de la guerre qui se préparait hier et se prépare aujourd’hui, en particulier contre la Russie. La proposition des députés insoumis de faire figurer le drapeau de l’ONU dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale affirmait cette volonté de paix plus sûrement que le belliqueux macronisme européen.
Mais cela supposerait de retrouver une France indépendante, sortant de l’OTAN, organisation militaire obsolète depuis la fin de la guerre froide, et travaillant au renforcement de l’ONU seule organisation légitime pour la sécurité collective. La France insoumise et son candidat se sont honorés à faire de la paix un enjeu de l’élection présidentielle. On voit chaque jour combien le programme L’Avenir en commun reste d’une brûlante actualité sur ces questions. Il est une base plus solide pour construire la paix qu’une éphémère décoration honorifique, même méritée.

Matthias Tavel

Partager cet article...
Share on Facebook
Facebook
Tweet about this on Twitter
Twitter
Email this to someone
email