Manuel Bompard : « Mélenchon peut être au deuxième tour »

Entretien exclusif. A l’occasion de la convention de l’Union populaire, Manuel Bompard, directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon réaffirme que « la clef de la victoire, c’est la mobilisation de la jeunesse et des quartiers populaires ».

Le débat sur l'élection présidentielle semble écartelé entre la mise en avant médiatique d'Eric Zemmour et les questions sociales notamment de pouvoir d'achat. Quelle est votre stratégie dans ce contexte ?

Nous sommes conscients de la gravité du contexte. Les obsessions haineuses de l’extrême-droite ont gangréné une grande partie de la classe politique. En mettant sur la table la loi sur le séparatisme et en déclenchant une chasse aux sorcières contre l’islamo-gauchisme (concept inventé par l’extrême-droite), le macronisme a banalisé comme jamais les idées racistes et réactionnaires.

Une partie de la gauche traditionnelle porte également une lourde part de responsabilités. Pour flétrir la principale force de l’opposition populaire, elle a alimenté ces campagnes ignobles et inventé des prétendues ambiguïtés avec la République. Pire encore, elle a cédé par manque de courage en s’alignant sur les syndicats policiers d’extrême-droite lors de la fameuse manifestation devant l’Assemblée Nationale.

Nous sommes un rempart : nous refusons de céder aux divisions mortifères et à la démagogie électoraliste. Nous voulons l’unité du peuple pour faire face aux défis qui sont devant nous. Ils sont immenses. C’est la crise climatique et environnementale car elle menace tout simplement la survie de l’espèce humaine. C’est l’explosion de la pauvreté et des inégalités. C’est la refondation démocratique du pays pour répondre au divorce entre les citoyens et les institutions périmées de la 5ème République.

Nous voulons convaincre que le poison de la division est la meilleure protection des puissants. Les programmes économiques d’Eric Zemmour et de Marine Le Pen n’ont rien à envier à celui d’Emmanuel Macron. Zemmour veut repousser l’âge de départ à la retraite et baisser les impôts pour les grandes entreprises ? Macron aussi ! Nous voulons démasquer l’extrême-droite et convaincre les catégories populaires qu’elles n’ont rien à en attendre : c’est pourquoi Jean-Luc Mélenchon l’a affronté en débat pour participer à cette œuvre de désintoxication mentale.

Quel est l'objectif de la "Convention de l'Union populaire" qui se tient à Reims les 16 et 17 octobre ?

En un mot, il s’agit de décréter la mobilisation générale. La Convention de l’Union Populaire marque une nouvelle étape de la campagne. Nous avions notre candidat, Jean-Luc Mélenchon, dont le sérieux et la capacité à faire bouger les lignes sont largement reconnus. Nous avons notre stratégie, l’Union Populaire, c’est à dire l’union du peuple autour de propositions politiques fédératrices. Nous aurons désormais, après notre Convention, un programme actualisé, l’Avenir en Commun. Nous sommes prêts.

C’est donc le bon moment pour réunir celles et ceux qui s’engagent dans cette bataille. La Convention permettra à chacun de s’approprier le programme et les propositions fortes pour convaincre. Elle sera un moment d’échanges et de partage sur les outils et les méthodes de la campagne : des ateliers permettront ainsi de se doter d’argumentaires sur les thèmes du programme, de se former au porte-à-porte ou encore de s’organiser pour la récolte des 500 parrainages d’élus nécessaire afin de pouvoir présenter notre candidature.

Enfin, la Convention se terminera par un meeting de Jean-Luc Mélenchon, ouvert à toutes et tous. (Dimanche 17 octobre, 10h, Parc des Expositions de Reims Site Henri-Farman, NDLR)

En quoi votre programme sera-t-il encore plus abouti qu'en 2017 ?

Les derniers évènements ont confirmé sa pertinence. L’impasse de la 5ème République a explosé au grand jour à travers la mobilisation des gilets jaunes et l’abstention vertigineuse aux élections intermédiaires. Les catastrophes climatiques et sanitaires ont rappelé le danger que fait peser le modèle capitaliste sur le seul écosystème qui rend la vie humaine possible. Et la pandémie a réhabilité le service public, fait apparaître le rôle indispensable des « premiers de corvée » et démontré l’impuissance dans laquelle nous enferme les dogmes du libre-échange.

La nouvelle version de l’Avenir en Commun sera enrichi de l’expérience des batailles parlementaires menées depuis 4 ans à l’Assemblée Nationale et depuis 2 ans au Parlement européen. Son actualisation est le résultat d’un processus ouvert, alimenté par plus de 10 000 contributions citoyennes et par des auditions de personnalités du monde syndical, intellectuel et associatif. Il sera plus tard accompagné de plans d’action précis et chiffrés, permettant de faire face immédiatement aux grandes urgences du pays. Notre Convention en lancera l’élaboration.

Un an après avoir proposé sa candidature, Jean-Luc Mélenchon revendique 255 000 parrainages citoyens. Qu'est-ce que cela change ?

C’est d’abord le succès d’une démarche, celle de l’investiture populaire. En proposant sa candidature, Jean-Luc Mélenchon avait fixé une condition : réunir plus de 150 000 parrainages citoyens. Ce chiffre a été atteint en 4 jours et a depuis été largement dépassé.

Mais c’est surtout une force conséquente dont peu de candidats peuvent se revendiquer. La mise en mouvement des citoyens qui soutiennent notre campagne est un enjeu central. C’est mathématique : si 8 millions de voix sont nécessaires pour figurer au second tour de l’élection présidentielle, il suffit donc que chaque soutien convainque 30 citoyens au cours de la campagne pour y parvenir. Ce n’est pas hors de portée !

J.-L. Mélenchon a annoncé la création d'un "parlement de l'union populaire". Qui en sera membre et à quoi servira-t-il ?

Le parlement de l’Union populaire a vocation à rassembler largement autour de la candidature de Jean-Luc Mélenchon. Il sera ouvert aux intellectuels, aux chercheurs, aux syndicalistes, aux militants associatifs ou encore aux personnalités ou groupes politiques qui souhaiteraient s’associer à la campagne. Se réunissant régulièrement, il participera aux réflexions stratégiques et programmatiques et prendra toute sa part dans la mise en mouvement de la société autour du programme l’Avenir en Commun.

Quelles seront les prochaines étapes de la campagne ?

La clef de la victoire, c’est la mobilisation de la jeunesse et des quartiers populaires. C’est pourquoi nous allons poursuivre le travail engagé autour des caravanes de l’Union Populaire. Une caravane nationale parcourra 12 étapes entre le 25 octobre et le 5 novembre et s’ajoutera aux multiples initiatives organisées chaque semaine par les groupes locaux. Elle vise plusieurs objectifs : favoriser l’accès aux droits sociaux, inscrire un million de personnes sur les listes électorales et présenter nos propositions.

De plus, notre programme l’Avenir en Commun sera disponible en librairie à la mi-novembre. Il pourra être précommandé en ligne à partir de la Convention. Un grand week-end de diffusion nationale du programme aura lieu les 20 et 21 novembre. Nous proposerons aux groupes d’action d’organiser partout dans le pays des points de vente du programme pour faire connaître largement nos propositions. Car, contrairement à d’autres, nous misons sur l’intelligence du peuple !

Propos recueillis par Matthias Tavel

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