Ecologie : les limites du « en même temps »
Préserver et « en même temps » détruire, établir des principes protecteurs de la nature et « en même temps » les rendre inoffensifs, faire et « en même temps » ne rien faire… telle est la logique environnementale en Macronie.
Le premier ministre, Edouard Philippe, et le ministre de la transition écologique, Nicolas Hulot, se sont prêtés la récemment au jeu du Facebook live. A la question : « une politique écologique est-elle compatible avec une économie de croissance ? », on apprend qu'Edouard Philippe, a lu l'excellent Collapse (Jared Diamond). Il se dit même « obsédé » par les menaces de l’effondrement qui pèsent sur notre civilisation.
Le premier ministre se demande : « Comment fait-on pour que notre société humaine n’arrive pas au point où elle serait condamnée à s’effondrer ? » En même temps, face à de tels enjeux, prétendument vitaux pour le sommet de l’Etat, le plan biodiversité présenté trois jours plus tard est sous-financé, repose sur des mesures incitatives, imprécis, et n’est pas du tout en mesure de ralentir le rythme effréné de la sixième extinction de masse. On débloque quelques millions pour la nature, quand pour soutenir les industries polluantes on trouve des milliards.
Lors de son point d’étape annuel, le 6 juillet, Hulot a reconnu que : « pour l’instant, le changement n’est pas à l’échelle ». Pire, les incohérences s’enchaînent. Hulot appelle à la protection des réserves naturelles, mais ne bouge pas le petit doigt sur le projet mortifère de mégamine en Guyane. Il parle de préservation des sols mais le gouvernement fait appel pour que le projet de centre commercial Europacity se construise. Il se targue d’opérer la transition dans l’agriculture et de préserver la biodiversité, mais le scandale du glyphosate laisse songeur. Enfin, la lutte contre la déforestation, nouveau cheval de bataille du ministère, est déjà entachée de l’affaire de la bioraffinerie à l’huile de Palme de Total, soutenue elle-aussi par le gouvernement.
Lors du congrès, l’environnement n’a été abordé qu’à la marge par le Président, et uniquement sous le prisme de l’économie. C'est ce qu'on appelle la dissonance cognitive. L'incapacité à organiser mentalement deux idées qui entrent en contradiction entre elles. Comment est-il possible d'être à la tête d'un gouvernement dont quasiment chacune des décisions aggrave le problème, tout en disant que le problème l'obsède ? Vous avez 4 heures.
Manon Dervin