L’arbitraire et le mépris

La pratique monarchique des institutions vient de franchir une nouvelle étape. Usage honni en République pour préserver la séparation des pouvoirs et garantir une vraie responsabilité du gouvernement devant la représentation du peuple, l'intervention du Président devant le Congrès du Parlement à Versailles devient avec Emmanuel Macron une habitude annuelle. En abordant absolument tous les domaines de la politique du gouvernement, le Président efface ce dernier et signifie une nouvelle fois que toutes les décisions relèvent de son autorité absolue. Irresponsable devant le Parlement, il n'a ainsi de compte à rendre à personne puisqu'aucune procédure de révocation citoyenne n'existe par ailleurs. Le contrôle du Parlement sur le gouvernement devient ainsi une fiction médiatique puisque le gouvernement ne fait qu'appliquer les décisions prises à l'Elysée.

En ce début d'été, le président épouse une autre tradition monarchique : celle des constitutions octroyées, qui s'oppose à la tradition constituante où une assemblée de représentants écrit un projet soumis aux citoyens. Selon une pratique devenue habituelle depuis 20 ans, les présidents successifs octroient leur réforme de la constitution, sans arriver toujours à la faire voter par les 3/5 du Parlement, procédure permettant de se passer de l'avis du peuple. Dans ce qui pourrait être la 25ème révision de cette constitution malade, Macron propose ainsi une nouvelle restriction des pouvoirs du Parlement, et notamment de son pouvoir d'amendement des lois, en cohérence avec l'irresponsabilité monarchique du président.

Macron partage aussi avec les pires expériences monarchiques l'arbitraire de décisions sorties de nulle part. Macron fait fuser dans tous les domaines des mesures qui ne figuraient pas dans son programme présidentiel et donc auxquelles le peuple n'a pas consenti en 2017. De son pari calamiteux de nouer une « relation très spéciale » avec Trump ... A la réduction surprise de la vitesse à 80km/h. Sans parler de sa mystérieuse « réforme des territoires pour réduire les dépenses publiques » annoncée à Versailles.

Tout dans son action transpire le mépris pour le peuple et les droits sociaux conquis par les luttes syndicales et politiques depuis la Révolution française. Après avoir raboté les aides au logement, amputé l'indemnisation des chômeurs puis dénoncé le « pognon de dingue » des minimas sociaux, voilà qu'il a sonné à Versailles le glas du droit au repos après une vie de travail, en affirmant que « la retraite n'est pas un droit auquel on a cotisé toute sa vie ». Jamais aucun président n'avait nié aussi frontalement les bases de la République sociale. Face à un monarque républicain aussi sûr de lui et dominateur, c'est une nouvelle révolution française qu'il incombe aux citoyens d'accomplir s'ils veulent retrouver le droit de citer dans leur propre pays et donc le droit de décider de leur propre vie.

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